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Histoire

Icarie (Ikaria) a un très riche patrimoine historique, comme en témoignent les monuments et les différentes découvertes provenant des fouilles archéologiques. Quand tu la connaîtras, tu ne l’oublieras pas!

L’histoire d’Icarie commence il y a des millions d’années. Les chercheurs ne savent pas quand elle a été habitée pour la première fois. Mais un assez grand nombre de découvertes montrent les différentes périodes d’apparition de la présence humaine, comme au néolithique, au début de l’âge du bronze, à l’époque mycénienne, etc. jusqu’à l’antiquité tardive. Pour beaucoup, Icarie est considérée comme le lieu où est né le dieu Dionysos, précisément dans la région de Drakano, et comme la patrie du vin. Il faut d’ailleurs noter que beaucoup de toponymes dans l’île sont liés à Dionysos.

Les dénominations de l’île

Avant de porter sa dénomination actuelle, Icarie avait été appelée Dolichi ou Doligi qui signifie, selon certains historiens, «ver», tandis que selon d’autres on l’a appelée ainsi en raison de la forme de l’île. D’autres dénominations lui ont été données: Makris, en raison de sa forme oblongue, la «Poissonneuse» (Icthyoessa) en raison de l’abondance de poissons dans la mer qui l’entoure, la «Venteuse (Anemoessa)», en raison de la violence des vents, Inoï, en raison de la grande quantité de vin qu’on y produisait. Il faut noter que le nom d’Inoï (Oinoe) a été donné plus tard à une ville d’Icarie.

La dernière dénomination qui de nos jours l’a emporté est Icarie, mais il y a beaucoup d’hypothèses quant à l’origine de ce mot. Selon le vieux chercheur Bochartous, ce nom provient de la racine ancienne I/kor qui en phénicien signifie «poissonneuse» ou bien de la racine, également phénicienne, kara qui signifie «brebis»: l’île serait appelée ainsi en raison de l’élevage qui y était développé.

Cependant, l’hypothèse qui a prévalu est que le nom d’Icarie provient du mythe connu d’Icare, quand son père Dédale et lui s’évadèrent du palais du roi Minos en Crète, en volant en direction de l’Ionie et des côtes de l’Asie Mineure. A un certain endroit, Icare, manifestement émerveillé et fasciné par la beauté du vol et des paysages qu’il voyait, monta plus haut, bravant le danger et le conseil de son père qui lui avait dit que s’il montait, ses ailes fondraient. Effectivement ses ailes fondirent, il tomba dans la mer et s’y noya (le site actuel est la région marine qui se trouve entre les villages de Chrysostomos et de Xylosyrtis, au sud d’Icarie, où ont été bâtis un monument et un amphithéâtre d’été). Cette mer a été appelée plus tard « mer icarienne » et l’île qu’elle baigne « Icarie ». Parmi les autochtones, c’est la dénomination de « Nicarie » qui l’a emporté, pendant que les habitants sont appelés «Cariotes » (pour les hommes) et « Cariotines » (pour les femmes) au lieu de « Icariotes » et « Icariotines ».

Préhistoire – Antiquité

Il n’y a pas grand-chose à dire sur la préhistoire d’Icarie. Quelques découvertes ont été faites dans la région de Kambos, d’Agios Kirykos, de Therma et de Glarédo, qui remontent à l’époque néolithique, 7000 ans av. J.C., quand se sont établis des habitants qui plus tard ont été connus sous le nom de Pélasges.

Pendant le VIIIème siècle av. J.C., Icarie fut colonisée pour la première fois par les habitants de Milet. Milet était une des plus grandes villes de l’Ionie et elle constitua une très importante force navale. Pendant des siècles, cette colonisation eut un effet positif pour la vie des Icariotes et plus généralement de tout l’espace insulaire. Les communications par mer se développèrent et le commerce devint florissant. La terre commença à être cultivée, la pêche et l’élevage prospérèrent. On exportait du vin, des pommes de terre, des olives, des abricots, du miel, du bois de construction, du charbon de bois, etc. vers d’autres îles et vers les côtes de l’Asie Mineure. Parallèlement, à cette période, les premières autorités de l’île commencèrent à s’organiser, comme l’église du dème, le parlement, etc.

Pendant l’antiquité, on considérait que les gros bourgs de l’île étaient au nombre de trois : Inoï (l’actuel Kambos), Therma et Drakano. Pour beaucoup il y avait aussi Tauropolio(n) (l’actuel Nas). Au cours du VIème siècle av. J.C., Icarie passa sous la domination du tyran de Samos, Polycrate. Samos se révéla alors une puissance navale de première importance et connut une grande prospérité, après qu’elle se fut affranchie de la puissance de Cyrus qui avait assujetti toute l’Asie Mineure et les îles. A cette période, fut bâti le temple d’Artémis à Nas. Plus tard, avec la chute du tyran de Samos, Icarie passa aux mains des Perses et précisément de Darius. Inoï et Therma firent partie, parmi les premières cités, de l’Alliance Athénienne qui se battait contre les Perses et qui l’emporta sur la politique expansionniste des Lacédémoniens. Icarie demeura dans l’Alliance Athénienne jusqu’à la soumission complète de l’île aux Macédoniens (vers 436 av. J.C.). C’est alors que fut créée une confédération unique sous le nom de « Communauté Icarienne ». Icarie passa au début au pouvoir d’Alexandre le Grand et appartint, après de nombreuses disputes entre ses descendants, au royaume de Pergame, sous le roi Attale III, autour du IIème siècle av. J.C. Par la suite, elle fut intégrée à l’empire romain.

L’époque romaine

Les premières années de l’empire romain, la paix régnait jusqu’à ce que Mithridate, venu de l’est, ne l’attaque dans le but de conquérir Rome. Avec la fin des guerres contre Mithridate (108-66 av .J.C.), la Méditerranée connut une grande agitation. L’action des pirates de Cilicie (côtes de l’Asie Mineure) fut marquante : exerçant leur domination sur toute la Méditerranée et sur Icarie, ils pillèrent l’île et dépouillèrent même le temple d’Artémis à Tauropolio(n). Après que Pompée eut écrasé les pirates, les îles parvinrent  à se ressaisir. Plus tard, cependant, avec l’ascension d’Octave, Icarie passa sous la coupe de Samos. Pendant la durée de l’occupation romaine, l’île se remplit d’exilés, tandis que la tyrannie des Romains se poursuivait, entraînant l’île dans une situation misérable.

L’époque byzantine

Il n’y a pas beaucoup de sources pour témoigner de la situation d’Icarie à l’époque byzantine. Cependant, d’après les traditions, on a su qu’à cette époque l’île a été un lieu d’exil pour la famille royale pendant de nombreuses années. C’est pour cette raison que les habitants se considéraient eux-mêmes comme des descendants de nobles et qu’ils ne permettaient pas les mariages avec d’autres, excepté les autochtones, de façon à conserver le sang royal. L’île connut alors une prospérité unique, les habitants reconstruisant leur habitat et veillant à leur défense, pendant que la population qui s’était accrue était extraordinairement nombreuse (des traditions parlent d’une population de plus de 70.000 habitants !). A l’époque byzantine, Icarie, ainsi que toute la mer Egée, fut à la merci des pirates et des barbares. Il faut signaler l’incursion des Sarrasins au VIème siècle ap .J.C., tandis que du XIème au XIIIème siècle, l’île subit des pillages répétés de la part des Génois, des Vénitiens, des Siciliens, des Turcs, etc.

A cette période, a joué un rôle important la forteresse imprenable de Koskinas (près du village de Kosikia), qui servait à la défense de la population. Elle présente un grand intérêt au temps de la piraterie, quand les habitants avaient abandonné les villages côtiers pour vivre dans les parties montagneuses et intérieures de l’île où ils n’étaient visibles ni depuis la mer ni par les pirates.Les Icariotes avaient réussi à mettre au point un système unique de survie : leurs maisons étaient bâties avec des pierres et des plaques de schiste de telle sorte que de loin elles apparaissaient  comme s’il s’agissait de rochers. Elles étaient basses de plafond et il n’y avait pas de cheminée pour l’âtre, afin que la fumée ne soit pas visible de loin. En plus, ils évitaient de circuler de jour, ils le faisaient seulement de nuit. Vers 1204 ap. J.C., Constantinople fut prise par les Croisés (début de l’occupation franque) et Icarie fut donnée aux Vénitiens, tandis qu’au XIVème siècle elle revint aux Byzantins, puis devint une possession de la famille génoise d’abord des Giustiniani par l’intermédiaire de la Maona (association commerciale chargée d’administrer et d’exploiter les îles de Chio, Samos, Icarie…) et enfin des Giustiniani Arangi. Pendant la période franque, la dernière occupation fut le fait des Chevaliers de Rhodes. Il faut remarquer que de cette période qui a duré plus de 150 ans, on n’a pas du tout fait de découvertes qui témoignent de l’influence des Francs à Icarie.

L’occupation turque

Après la prise de Constantinople par les Turcs Ottomans et le retrait des Francs de la mer Egée, beaucoup d’habitants de Samos se déplacèrent pour s’installer à Chio, afin de bâtir un front commun de défense contre l’ennemi commun qui étendait sa domination en mer Egée. Les Icariotes, cependant, n’acceptèrent pas d’abandonner leur île et de s’installer à Chio, mais ils adoptèrent la tactique de la dissimulation dans des habitats secrets situés dans les montagnes, comme ils l’avaient fait par le passé, dans le but de montrer que l’île était déserte et inhabitée. Cette période a été qualifiée de « siècle de l’obscurité » et a duré de 1521 à 1601 (80 ans), alors que la population s’était regroupée, entre autres, dans les régions de Lagada, Koumaro, Pézi et Perdiki. Avec cette façon de se dissimuler, les Icariotes parvinrent à échapper aux incursions du pirate turc Barberousse (vers 1537 ap. J.C.). Il faut noter que pendant cette période est apparue une grande vague d’émigration intérieure vers des destinations plus sûres, comme l’était la stérile Icarie, et ainsi des éléments incontestables témoignent de l’installation dans l’île d’une population venue du Magne (Péloponnèse). Les Icariotes commencèrent petit à petit à émerger et à circuler dans l’île, quand l’empire ottoman fut dirigé par le sultan Soliman le Magnifique, qui était assez clément vis à vis des insulaires. Vers le XVIIIème siècle, s’installa dans l’île le premier « agha » (officier turc) pour percevoir les impôts auprès des habitants et contrôler l’administration locale. Il est significatif que les habitants eux-mêmes soient parvenus à l’éliminer. La phrase est demeurée historique quand on leur demanda qui avait fait cela : « Nous tous avons fait cela, seigneur ». Les guerres russo-turques (1770-1774) en mer Egée, auxquelles contribua la flambée de la piraterie à cette période, furent désastreuses pour Icarie.

Au cours de la révolution de 1821, beaucoup d’Icariotes s’étaient inscrits à la Société Amicale (ou Hétairie des Amis : société secrète dont le but était l’indépendance de la Grèce). La révolution nationale donna un grand optimisme aux îles frontalières. En 1822, après l’atroce massacre de Chio, beaucoup d’habitants de cette île trouvèrent refuge à Icarie qui était voisine. En 1823, Patmos fut élevée au rang de province à laquelle fut rattachée Icarie. Avec le protocole de Londres de 1830, l’île fut rendue aux Turcs et fut obligée de payer un impôt (le maktou) au sultan Mahmoud II, mais une grande prospérité marqua cette période, surtout dans les domaines de la navigation et de la fabrication de charbon de bois. En 1912, l’état turc préparait l’occupation de l’île par des Kurdes et des Lazes (ou Tchanes, peuple caucasien vivant dans le nord-est de la Turquie). Les Icariotes, cependant, ne supportant pas cet autre joug, se révoltèrent et proclamèrent leur indépendance, en constituant « l’Etat Libre d’Icarie ». Le gouvernement fut constitué par le médecin Ioannis Malachias, il eut sa propre constitution, son drapeau et son hymne. Cet état libre dura quatre mois, jusqu’en novembre 1912, quand l’île fut officiellement rattachée à la Grèce.

A l’époque contemporaine, Icarie a subi le même sort que toute la Grèce, à savoir la pauvreté pendant les deux guerres mondiales et un rapide développement de nos jours. Icarie est connue jusqu’à aujourd’hui comme l’île des exilés ou l’île rouge. En raison de sa géomorphologie, elle a accueilli un grand nombre d’exilés, pendant la 2ème guerre mondiale et après, des communistes qui ont réussi à faire un avec la population locale, comme le compositeur connu Mikis Théodorakis.